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31 July 2006

NOVI SAD – FRUŠKA GORA

  Du 15 au 16 avril 2006

 

Le temps d’un week-end, Michel et moi partons pour le parc naturel de Fruška Gora, la partie montagneuse de la région de Voivodine, au nord-ouest de Belgrade. Nous quittons Yves le matin, direction Novi Sad. A l’entrée de la ville, au péage de l'autoroute, c’est avec stupeur que nous apprenons qu’il nous faut payer quinze euros (pour à peine 100 kilomètres !). Aucun prix n’est affiché ; il nous est donc impossible de vérifier si c’est une arnaque ou non. Ce prix nous parait d’autant plus élevé que nous savons que le salaire moyen est de 150/200 euros par mois en Serbie ! Qui peut donc prendre l’autoroute ? Avons-nous été soumis à un tarif « touristes » ?...cela reste un mystère!

 

            Arrivés à Novi Sad, nous cherchons une place pour garer la camionnette. Comme très souvent, ceci s’avère être difficile. Alors que nous tournions dans la vieille ville à la recherche d’un emplacement, une sensation de bien-être m’envahis. Enfin, une ville à taille humaine, respirant la vie ! Nous en avions tellement besoin après Belgrade et ses immeubles écrasants de style stalinien. Mais les petites maisons n’étaient malheureusement medium_P1030830.JPGcaractéristiques que de ce quartier de Novi Sad. Peu importe : nous avons eu notre bol d’air frais ! Notre déception fut d’ailleurs allégée par l’ambiance enjouée de la ville : des ballons flottaient partout, les gens étaient dans les rues, comme pour nous, un jour de fête, de la musique, des roulottes vendaient des biscuits, des colliers avec une petite clochette…Et oui, c’est la fête des rameaux !  Nous nous dirigeons vers l’église et y voyons pour la première fois, le rituel orthodoxe consistant à baiser les icônes. C’est alors que nous prenons conscience de nos lacunes concernant cette religion…Un prétexte, ou plutôt une occasion de faire des recherches à ce sujet !

 

Au centre-ville, je dois avouer avoir été frappé par ce que je considère être la vulgarité chez une femme : mini jupe, bottes vernies, décolleté plongeant (le mot est faible), maquillage à outrance…sans oublier la touche finale : ce que j’appelle les lunettes de mouche. Mais je tourne la tête, et je vois son sosie… non ! j’en vois deux !…non trois… quatre ! En fait, elles sont presque toutes pareilles, les jeunes, comme les plus âgées. Elles m’apparaissent comme des robots qui reproduisent les codes de la mode : aucune spécificité, aucune imagination, un simple copier-coller qui me semble si fade, si vide, si superficiel. Alors que je considérais cette tenue vestimentaire comme provocante et vulgaire, celle-ci paraissait donc totalement rentrée dans les mœurs serbes, et il était « normal » pour une femme de s’habiller de la sorte. Mais je dois préciser que les tenues féminines à Belgrade étaient bien plus "soft". Différence grande ville - petite ville, France - Serbie… Ah !l’interculturel, quand tu nous tiens !(Ce point de vue est subjectif, néanmoins, je pense qu'il est révélateur de ce que pourrait éprouver un français en y séjournant. Je veux justement montrer que tous autant que nous sommes, nous restons conditionnés par notre culture. Le plus important est d'en avoir conscience. Aussi, est-il dangereux de ne pas aller plus loin dans l'analyse des comportements des uns et des autres. La tenue vestimentaire des jeunes femmes serbes que je décris plus haut peut et doit donc être analysé. C'est ce que nous ferons dans la partie "Analyses" du blog.) 

 

 

            Après un petit tour dans cette ville, nous décidons d’aller à Sremski Karlovci en fin de journée. medium_P1030861.JPGAnecdote amusante : Pour y aller, il nous fallait traverser le Danube par un pont que l’on pourrait qualifier à multi-usages : ainsi, nous ne l’avons emprunté, qu’une fois que le train et les voitures du côté opposé soient passées. Lorsque nous arrivons sur place, tout le village est en émoi : toutes les générations sont rassemblées autour de l’église : là aussi, on célèbre la fête des rameaux. L’ambiance y est différente qu’en ville : celle-ci est plus familiale, plus simple, sans vendeurs.

Sur la terrasse du café de ce petit village, aux confins de la campagne serbe, nous faisons connaissance avec une association de la région parisienne organisant des spectacles de danse, autour d’échanges de jeunes. Cette initiative nous parait très intéressante mais nous regrettons un manque de mixité culturelle : les jeunes français sont en majorité d’origine serbe.

 

 

            Après une nuit dans la camionnette, nous partons pour les monastères de Hopovo et de Krušedol. Tous deux datent du Moyen Age. Comme l’usage de l’époque le voulait, les chapelles de ces derniers étaient peintes, du sol au plafond, dans des tons de bleu, de rouge, etc…une petite merveille encore très bien conservée! Tous deux ont été rénové à l’extérieur mais chacun a son charme propre. Dans le dernier, nous rencontrons une famille allemande dont la mère, qui était d’origine serbe, voulait faire découvrir ce pays à ses enfants.

                                                                 

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            Pour rentrer à Belgrade, et après notre mauvaise expérience à l’aller, nous optons plutôt pour les petites routes. De temps à autre, nous y croisons les étalages de paysans qui vendent leurs fruits et légumes ainsi que leurs boissons maisons (Jus de fruit ou liqueur). Les conducteurs intéressés n’ont plus qu’à s’arrêter. Nous croiserons aussi une immense antenne télé ou radio que nous apercevions toujours, depuis la veille, de très loin. Arrivée au pied de cette impressionnante construction, nous constatons avec surprise que la structure des bureaux, qui est perchée au moins à 80 mètres de hauteur, est détruite. Nul doute qu’elle a subi les bombardements de l’OTAN en 1999. Enfin, nous croisons un dernier monument dédié aux soldats de la Seconde guerre mondiale, consistant en une femme symbolisant sans doute la liberté juchée sur une grande colonne en pierre. Les paysages magnifiques de cette campagne encore un peu sauvage nous laissent de jolis souvenirs.

 

 

Florence

 

26 July 2006

Roman, interculturel.

LA SALAMANDRE

 

Jean-Christophe Rufin

 

 

L’auteur de « Rouge Brésil » (prix Goncourt 2001) et président de l’association humanitaire « Action contre la faim », nous livre ici un roman tragique qui pourrait s’inscrire dans notre rubrique « interculturel ». Personnellement j’ai bien aimé ce petit roman.

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Je vous recopie simplement la « quatrième de couverture ».

 

« Catherine, dont la vie s’organisait autour du travail avec la haine des dimanches, le secours de la télévision, l’affection d’un chat et l’usage fréquent des somnifères, tourne le dos à la France pour s’installer au Brésil. Dépassant sa condition de touriste, elle quitte l’univers de agences de voyage pour celui des favelas. La violence avec laquelle les gens se traitent entre eux ne lui est alors plus épargnée. Dans ce récit d’un parcours absolu, Jean Christophe Rufin livre une tragédie moderne, où l’héroïne semble soudain obéir à une loi profonde qui la pousse à se détruire et à s’accomplir en même temps. A travers ce portrait d’une femme qui se perd et se découvre, l’auteur reprend aussi un thème qui lui est cher, celui de la rencontre entre les Occidentaux et leur Tiers-monde fantasmé. Loin de la vitrine exotique et du mythe révolutionnaire, il va au-delà de la vision idéalisée, tout au moins « idéologisée », du Tiers-monde, vers un monde ambivalent, fait à la fois de richesse et de violence, repoussant et attirant. »

 

Michel

 

Source photo livre: http://www.amazon.fr 

 

 

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20 July 2006

Belgrade

Du 10 au 20 avril 2006



medium_P1030670.2.JPGNous resterons une dizaine de jours dans la capitale serbe. Trois jeunes nous offrent l’hospitalité : Igor, membre des Jeunes Européens de Serbie, Sania et Rado. Ils habitent tous les trois dans un appartement d’une cinquantaine de mètres carré. Sania est la seule à avoir une chambre et les deux garçons dorment dans le salon. Malgré le manque de place, ils ont accepté de nous recevoir tous les trois car, pour la deuxième fois pendant ce voyage, Florence vient nous rejoindre. Voilà des jeunes d’une rare hospitalité et il faut avouer que nous avons passé un excellent séjour avec eux, l’un des meilleurs de ce voyage.

Nous ne serons pas gâté par le temps car pendant ces dix jours il pleuvra presque sans interruption. D’ailleurs, comme dans les autres pays d’Europe centrale, le Danube est sorti de son lit et nous passerons plusieurs fois avec notre camionnette par des routes inondées. L’une d’entre elles, largement recouverte d’eau, fera beaucoup de victimes parmi les voitures qui s’y sont aventurées. Je ne compte plus les pauvres véhicules au moteur fumant qui jonchaient le bord des routes !

La ville s’avère plus jolie que nous ne le pensions. Certes, ce n’est ni Prague ni Budapest, mais il y a tout de même pas mal de choses sympathiques. Mais ce n’est pas l’avis de Le Corbusier, qui, d’après Igor, aurait dit que Belgrade « était la pire des villes au meilleur des endroits ». A voir le style Corbusier, chacun interprètera cette phrase comme il l’entend ! Mais il est vrai que l’emplacement de la ville est stratégique. Elle se trouve au confluent du Danube et de la Sava, en quelque sorte, au point de passage entre les Balkans et l’Europe centrale. Vous pouvez en avoir un remarquable aperçu en vous baladant du côté de la citadelle de Kalemagdan qui surplombe le fameux confluent. De ce fait, Belgrade est une ville qui fût continuellement détruite et reconstruite. C’est une histoire qui semble lui coller à la peau, jusqu’à récemment, puisque la ville a subis les bombardements de l’OTAN en 1999. Et les bâtiments bombardés sont toujours en ruine ; par exemple, le Ministère de l’armement, en plein centre ville, composés de deux bâtimentsmedium_P1030551.JPG jumeaux de part et d’autre d’une artère principale. On constate aisément, d’un simple regard, que cette destruction n’est le fruit que de quelques bombes ou missiles. Ces derniers étaient donc des modèles dévastateurs (missiles Tomahawk ou bombe guidée laser de 1000kg pour les connaisseurs). La présence de Florence confirme mon ressenti (voir article de Vukovar) quant à la différence entre « voir » un paysage de ruines en photographie et « voir » ce même paysage en réalité. Bien qu’elle ait vu toutes les photos de Vukovar et de Mostar, qui représentent des destructions bien plus impressionnantes que celle de Belgrade, elle reste néanmoins sans voix et profondément troublée en face de la carcasse du Ministère de l’armement. « Ca n’a vraiment rien à voir avec les photos…et les livres d’histoire ! » me confiera-t-elle !

Nous aurons aussi la chance de visiter le mausolée de Tito, le fameux général qui avait réussi à gouverner la fédération yougoslave sous un régime communiste plutôt « soft » durant lequel les tensions nationalistes étaient très faibles. Il est impressionnant de voir combien cet homme continue de faire l’unanimité chez les personnes que nous rencontrons. Tous regrettent la société plus égalitaire, sans chômage et sans haines nationalistes qui existait sous son règne.

medium_P1030520.JPGEnfin, autre particularité touristique, la grande église orthodoxe en pleine construction, la plus grande de tous les Balkans. C’est toujours impressionnant pour nous de voir des églises en construction. En France, même si l’on parle beaucoup de regain religieux, nous n’en sommes pas encore à reconstruire des églises. Mais dans les pays que nous traversons, il n’est pas rare de voir des chantiers d’églises. Celui-ci est sans aucun doute le plus impressionnant que nous ayons vu.

En dehors du « tourisme de guerre » et du « tourisme religieux », un troisième « tourisme » commence à prendre de plus en plus d’ampleur, celui de la pauvreté.
Lorsque nous rentrons dans Belgrade en venant de l’autoroute de l’ouest, juste avant de traverser le Danube, nous sommes confrontés pour la première fois à des bidonvilles. Et d’une taille impressionnante ! En face même de l’immeuble de nos amis, il y a quelques maisonnettes construites de bric et de broc sur une petite colline recouverte d’ordures. Le moyen de transport de ces gens, les fameux « gitans » ou « gypses » en anglais, se trouve au pied de notre immeuble et consiste en un cheval accroché à un arbre et d’une charrette. Vision étrange que celle de ces embarcations d’un autre temps au beau milieu d’une capitale, parmi la circulation des voitures et des autobus ! Certes, nous avons déjà croisé quelques charrettes depuis le début du voyage, mais jamais au beau milieu des grandes villes ! Quant aux sollicitations, elles sont ici beaucoup plus nombreuses, les personnes démunies beaucoup plus visibles.

Nous apprenons également, au cours de nos discussions avec nos amis, qu’un serbe gagne en moyenne 150 à 200 euro par mois. C’est le genre de choses que nous savions. Mais que le coût de la vie soit si élevé, là c’est une surprise ! Certes, c’est en général beaucoup moins cher qu’en France, mais pas vraiment pour tout et même pas du tout pour certaines choses. Ne parlons pas du prix des appartements, ou encore de celui de l’essence ! C’est tout simplement incompréhensible. L’essence coûte exactement le même prix qu’en France, quelque soit le pays que nous avons traversé. Donc un plein de diesel coûte 50 euro ! Comment font ces gens pour vivre alors qu’il y a des voitures partout lorsqu’on gagne 150 euro par mois ? Pour nos amis, qui sont tous les trois étudiants, pas d’alternatives, ils ont tous les trois un job. Sania travaille dans une librairie et Rado dans un bar comme serveur. Il gagne un peu plus de 100 euro pour plus de 60 heures de travail par jour. Et ici, inutile de chercher les aides de l’Etat très longtemps. Certes, elles existent, mais nous ne sommes pas en France, c’est clair !

Néanmoins, les difficultés mises à part, notre séjour restera marqué par une excellente ambiance, légère et joyeuse. medium_P1040158.2.JPGDiscussions enrichissantes, éclats de rire, sorties, cuisines, même la petite fête de mon anniversaire, furent les ingrédients de cette petite collocation d’une dizaine de jours entre trois Français et trois Serbes. Un excellent souvenir et de nouveaux liens d’amitiés… européens !

Michel






19 July 2006

Carte de la Serbie

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Source: http://fr.wikipedia.org

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14 July 2006

Analyse Bosnie-Herzégovine 2

 

Bosnie-Herzégovine

 

Deuxième partie

 


Dans cette partie nous nous attacherons à rendre compte plus précisément de nos interventions et de nos discussions avec les autochtones. Cette analyse recoupe largement ce que Yves a déja rapporté dans les articles précédents.

 

Mostar (Fédération croato-musulmane) :

  

    Choc culturel: 
 

Ce qui nous plaît beaucoup, depuis que nous sommes dans cette ville, c'est l'immense fossé qui sépare notre représentation d'un musulman de ceux que l'on voit ici.

Tout d'abord le physique est tout à fait le même qu'un français, type classique d'un " européen blanc ". Certes pas tous, certains ayant un physique plus " oriental " dirons nous, mais ils sont minoritaires. Puis vient le style vestimentaire. Après notre semaine à Mostar mes deux mains suffisent à compter le nombre de foulards aperçus qui couvraient la tête d'une femme.

Par contre, impossible de compter le nombre de " fashion victim " croisées dans la rue… et pour être tout à fait franc, depuis le début de notre voyage, nous n'avons jamais vu aussi " fashion " et aussi provoquant chez les jeunes femmes. Et ces jeunes femmes sont musulmanes ! J'imagine la surprise, voir le choc, chez un français ou tout autre européen (qui sont tout deux souvent racistes, même s'il ne faut pas le dire) qui se balade dans les rues de Mostar. D'abord il croira se retrouver dans un clip de Hip-hop américain où toutes les femmes sont une promesse de jouissance, au moins visuelle (sic). Puis glissez-lui dans l'oreille que ces jeunes femmes sont musulmanes… vous avez là la recette d'un " choc culturel " ! 

Un choc parce que la connexion est tout à fait impossible entre ce qu'il voit et se qu'il s'imagine être une femme musulmane. D'ailleurs, je vous l'avoue, moi-même j'ai encore un peu de mal à faire la connexion. Même si je suis un peu trop informé pour être victime de stéréotypes trop grossiers, je ne m'étais tout de même pas imaginé… à ce point !

 

    Intervention à l'école: 
 

Au sujet de notre intervention dans une école primaire située du côté est de la ville, donc dans une école musulmane, l'effet est le même. Des jeunes âgés de 10 à 14 ans, donc pas encore trop touché par la " fashion victim attitude ", mais, idem, tout à fait comparable à toute classe de petits français.

Je fais le pari, en étant sûr de gagner, que si nous plaçons n'importe quel français dans cette classe, il sera impossible pour lui de dire le pays d'origine de ces jeunes et, surtout, encore moins qu'ils sont musulmans.


Et ces jeunes vont nous surprendre davantage encore. Tout d'abord, notre interprète sera inutile, sauf pour les moins de 12 ans, car la majorité des élèves comprennent l'anglais et surtout le parle. Alors qu'en France, l'un des pays le plus " riche " du monde, on apprend une langue dix ans sans être capable de la parler, ici, dans un des pays les plus " pauvre " on sait la parler à l'âge de 12 ans !

Sur ce point le Bosnie-Herzégovine est à mes yeux plus riche que la France. Et ces jeunes sont futés, pleins de bon sens, intéressés. Bref, c'est l'une de nos meilleures interventions (et j'en ai pourtant une bonne centaine à mon actif, dont une cinquantaine en France). Elle nous laisse, surtout, plein d'espoir pour un pays qui a bien besoin d'une jeunesse ouverte et motivée.

 

    Citoyenneté active: Abraševic
 

Pour finir, un superbe exemple de citoyenneté active nous sera donné par les jeunes qui s'occupent d'un lieu tout à fait particulier, nommé Abraševic (prononcé " abrachévitch ").

C'était, 67 ans plus tôt, en 1928, un haut lieu de la vie sociale et culturelle. Aujourd'hui c'est encore une ruine. Les jeunes ont manifestés pour se réapproprier cet endroit avec des slogans comme " Rendez Abraševi? aux jeunes " ou encore " Nous avons tous droit à un toit au-dessus de nos têtes ". Et, à force d'efforts et de négociations, ils sont enfin parvenus à obtenir gain de cause.

On nous proposera de garer notre camionnette dans l'enceinte de cet endroit où nous aurons une parfaite autonomie avec Internet et douche à disposition. Les bâtiments étant toujours en ruine, les jeunes logent dans des containers qui sont équipés comme de petits appartements.

Enfin, nous assisterons dans la " salle de spectacle ", à la projection d'un film espagnol sous-titré en serbo-croate et à une pièce de théâtre joué par des jeunes locaux entièrement en allemands. Décidément, rarement nous ne nous sommes autant sentis en Europe qu'à Mostar, pourtant tellement orientale avec ses minarets pour ligne d'horizon.

La voilà enfin, enfin, la différence, de la vraie ! Pour nous le voyage commence sans conteste à Mostar, grâce, notamment, à la beauté de cette ville et de ses mosquées. Et quelle chance pour l'Union européenne d'avoir la possibilité d'intégrer un jour ce pays en son sein.

 

 

Sarajevo (Capitale de la Fédération croato-musulmane et de la Bosnie-Herzégovine) : 

 

    Intervention au lycée: 
 

Nous passerons seulement deux jours à Sarajevo mais y effectuerons une intervention inoubliable. Les élèves sont une fois de plus des musulmans, âgés de 18 ans, et, comme leurs camarades plus jeunes de Mostar, tout à  fait semblables à n'importe quel jeune français.

Nous commençons notre interventions et arrivons rapidement à la question du " est-ce que vous vous sentez tous, ici, bosniaques ? " (Petite précision : " bosniaque " est généralement considéré comme désignant les musulmans de Bosnie-Herzégovine alors qu'un " bosnien " est le terme général pour un habitant de la Bosnie-Herzégovine). Dans tous les autres pays, par exemple la Slovénie, on nous réponds toujours " bien sûr que nous nous sentons slovène " avec une touche d'incompréhension face à une question aussi stupide.

Ici, encore une surprise ! Les élèves ne veulent pas répondre. Nous insistons ! Alors on commence à nous dire que cette vision de l'identité est tout à fait ridicule. Un élève se lève même jusqu'au tableau et nous fait un schéma pour nous expliquer " qu'ici, si tu dis que tu es un bosniaque, tu es donc un habitant de la Fédération croato-musulmane, tu parles bosniaque et tu es donc musulman. Tout comme si tu es un serbe, alors tu es un habitant de la République serbe de Bosnie, tu parles serbe et tu es orthodoxe ".

Pour eux cette vision des choses et ridicule et réductrice, il ne veulent pas y être associés !!! Eh bien çà ! Nous n'avons encore rien dit que se sont les élèves qui font notre cours à notre place ! Alors qu'il ne nous faut pas moins d'une bonne heure, en général, pour faire assimiler cette notion aux élèves, ici, nous n'avons même pas besoin de faire l'intervention. Je les regarde en souriant et leur dit " eh bien écoutez, je crois que nous allons rentrer chez nous puisque nous n'avons pas grand-chose à vous apprendre ! ". Evidemment nous resterons, cette fois nous même étant les plus motivés des élèves.

 

    Autour d'un café: 


Nous irons ensuite boire un verre avec ses jeunes et apprendrons beaucoup. Nous parlerons encore de ces problèmes identitaires réducteurs. Pour vous dire, même les prénoms vous assimilent à une identité. Par exemple, l'une des jeunes filles s'appelle ?, ce qui l'assimile, " normalement ", à une serbe, alors qu'elle est bosniaque.

Nous parlerons aussi de la guerre. Au début ils ne souhaitent pas l'évoquer, mais, tout doucement, les langues se dénouent. Finalement ils n'ont pas beaucoup de souvenirs, juste qu'ils étaient enfants et que cette situation leur paraissait normale puisqu'ils n'en avaient pas connu d'autres.

Certes ils souhaitaient la paix mais n'avaient, en fait, aucune idée de ce que cela voulait dire. Ils ne pouvaient pas sortir de chez eux, suivait des cours dans des garages, des caves ou à domicile. ? se demande encore comment elle faisait pour monter plusieurs fois par jour le lourd bidon de 10 litres d'eau jusqu'au sixième étage alors qu'aujourd'hui elle s'en sent incapable. " Comme quoi, on peut s'adapter à tout ! " nous dira-t-elle !

Autant de bon sens chez ces jeunes fait plaisir à voir. Dommage qu'il faille, apparemment, vivre la cruauté d'un tel conflit pour parvenir à cette clairvoyance.

Enfin, nous parlerons aussi du problème lié aux visas. La Bosnie-Herzégovine et une sorte de " prison " de laquelle il est presque impossible de sortir. Ils peuvent aller en Croatie en Serbie et à… Cuba sans visa. Pour le reste, c'est quasiment impossible. Nous comprenons mieux les réponses que l'on nous fait habituellement sur les avantages d'intégrer l'Union européenne : " avoir une vie meilleure et… pouvoir voyager ".

 

 

Banja Luka (Capitale de la République serbe de Bosnie) :

 

    Interventions au Centre Culturel Français:
 

Nous ferons quatre interventions à Banja Luka, organisée par Bérengère, la directrice du Centre Culturel français qui nous a remarquablement accueillie. Les deux premières concernent des personnes de tout horizon. La plupart seront très satisfaites.

Une jeune nous donnera du fil à retorde sur la question de savoir si elle se sentirait serbe si elle avait été adopté étant encore un nouveau né, par un couple allemand sans le savoir. Elle ne démord pas : " si mes parents sont serbes, alors je suis serbe ! ". Mais elle finira par " y réfléchir " en lui faisant bien comprendre qu'il faut qu'elle s'imagine que ses parents adoptifs ne lui ont jamais dit qu'elle était serbe et adoptée. Les autres approuvent. Evidemment, ils ne se sentiraient pas serbe mais allemand. Ouf !

Une autre de ces jeunes, Natasa, a déjà assimilé toutes ces notions, sans jamais avoir voyagé, juste grâce à la connaissance et au bon sens. Cela fait plaisir ! 

Nous aurons aussi une discussion avec deux militaires qui avaient assisté à notre intervention et qui se débrouillent très bien en français. L'un deux, plus posé, nous dit qu'il nous approuve. Il pense que les religions ne sont pas un vrai problème mais que c'est les politiciens qui s'en sont servis pour manipuler les gens. Pendant la guerre il n'était pas sur la ligne de front puisqu'il s'occupait de la défense anti-aérienne.

Très intéressant, il nous fait remarquer qu'il a déjà " quitté son centre " (notion dont nous faisons la promotion pendant nos interventions) en partant en mission en Ethiopie, notamment pour s'occuper du problème avec l'Erythré. Il dit qu'il a constaté, là-bas, que les gens devaient faire face aux mêmes problèmes quotidiens et, surtout, aux mêmes manipulations des hommes de pouvoir. Expérience très bénéfique pour lui !

Quant au second militaire, nous dirons que c'était un " pur ". Dans le sens où dès le début il nous dit que nous ne pouvons pas les comprendre. " N'est-ce pas normal que l'armée intervienne face à une région qui veut faire sécession d'une grande nation ? ". Tout y passe, comme la ridicule glorification de " la grande histoire française ", une " grande nation " qu'il envie. Décidément on ne vit pas sur la même planète. Yves me dira même que sur certain point de la discussion, il en a eu la nausée !

 

    Interventions avec le "parti des Jeunes Démocrates": 
 

Deux autres interventions auront lieu avec le " parti des jeunes sociaux-démocrates ". Soyons franc, alors que nous nous attendions à une intervention un peu corsée avec des jeunes politisés, nous  aurons ici notre pire souvenir.

Aucun ne parle anglais, ils sont pleinement indifférents, ne comprennent absolument rien à nos questions et sont totalement incapables de nous expliquer les objectifs de leur parti politique. Une jeune nous dit même qu'elle voudrait un retour à la monarchie, la démocratie étant un régime mauvais, sous prétexte que c'est la foule qui décide et que, selon elle, " si deux personnes sur trois décident qu'il ne faut pas travailler, alors personne ne travaille, c'est çà la démocratie " ! Epoustouflant, non ? Elle sera incapable de développer un argumentaire cohérent et d'expliquer cette phrase digne du plus stupide des démagogues, qu'on a du lui souffler lors d'une réunion. Nous quittons ces jeunes opportunistes avec un goût amer au fond de la gorge.


Heureusement la seconde se déroulera de manière classique et nous rassure quelque peu. L'un des plus radical ne nous ménage pas en expliquant qu'il n'a rien contre les " autres " mais qu'il aimerait pouvoir être lui-même et garder ses traditions. " Pourquoi n'avons-nous pas le droit de garder notre drapeau et notre hymne national ? C'est injuste ". Le militaire cité plus haut m'avait déjà fait part de ce problème. Alors que c'était un homme de consensus, prêt à faire des sacrifices, il ne comprenait tout de même pas pourquoi il devait abandonner son drapeau et son hymne national. A vrai dire moi non plus !

 

    Rencontre avec un militaire de l'OSCE: 
 

Enfin, nous ferons une excellente rencontre au cours d'une soirée chez Bérengère. R. travaille à l'OSCE (Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe) largement présente dans le pays. Je lui demande des détails sur son job. C'est un homme calme, tout à fait cynique et passionnant.

Il nous dira que son boulot c'est " d'imposer la démocratie ". Je lui demande si " ça se passe bien avec la population ? ". " Oh oui ! " me répond-il, " on leur fait une bonne clé de bras, on leur braque un flingue sur la tempe et on menace de leur coller un procès au cul… donc ils coopèrent, çà va ! "Vous l'aurez compris, R. n'est pas un politicien, c'est un homme de terrain !

Il nous dit que parmi les 6000 hommes de l'EUFOR il y a 36 nationalités, même des Chiliens. En fait, c'est donc une force de l'ONU dirigé par l'UE. Il nous parle de la situation de tutelle du pays et des pleins pouvoirs du " nabab local ", le haut représentant de l'ONU.

Il est vrai que Paddy Ashdown a été remplacé depuis quelques mois par un allemand de plus de 80 ans. Dans ses discours, il semble qu'il commence à fermer les yeux au bout de 20, 30 minutes. Officiellement il faut dire que c'est parce que ça lui permet de mieux se concentrer. En fait il ronfle ! Il s'est même cassé la figure de sa chaise, une fois, au Parlement à Sarajevo.Et bien voilà un changement de point de vue plus qu'intéressant !

Il nous dit que pour lui, les Balkans commence après la Croatie. J'ai le même avis à présent. L'un de ses moyens de repère consiste dans le fait que lorsqu'une personne vous dit : " ce bâtiment à été construit par les austro-hongrois, avec des pierres de Hongrie, par un architecte italien, etc ",  vous n'êtes pas dans les Balkans. Si la personne vous dit : " ce bâtiment à été construit par nous, avec nos matériaux, par notre architecte, etc ", vous êtes dans les Balkans.

Nous parlons aussi de la mentalité des Serbes. Il nous fait par de son avis, de leur complexe du martyre, du réflexe de suivre un chef. " Les partis ne sont pas des partis, c'est un homme que les autres suivent " précise-t-il. Notre rencontre avec les jeunes semble le confirmer, comme l'un d'eux qui nous dira " nous avons besoin d'un guide ". " Si vous allez voir les ultras, ils vous balancent le complot musulman appuyé par les Etats-Unis, le protocole des Sages de Sion, etc " ajoute-il encore. " Et si on leur dit que maintenant ils sont enfin libre, ils vont vous dire que ce n'est pas vrai car ils sont soumis d'une autre manière ".

Nous parlons aussi du problème de la gestion actuelle de la Bosnie-Herzégovine. Pour lui, les accords de Dayton entérinent, en quelque sorte la victoire des bosniaques. Ceux-là, du coup, " prennent un malin plaisir à humilier les Serbes ". Dernier exemple en date, le chant patriotico-religieux et l'insigne de la République serbe sont devenus illégaux (problème mentionné plus haut). Alors qu'un politicien, prétendument ultra, lui avait dit que si ils pouvaient au moins conserver ces deux symboles, c'était bon, il était prêt, en gros, à tous les sacrifices (R fréquente beaucoup les politiciens). Nous passerons, décidément une riche soirée !

 

 

Tuzla (Fédération croato-musulmane) :

 

    Centre Culturel Français et citoyenneté active: 
 

Notre passage à Tuzla sera rapide. Nous dormirons pendant deux jours au milieu de la bibliothèque du Centre Culturel français, mise à notre disposition par son très sympathique directeur, Pascal.

Nous rencontrerons rapidement quelques jeunes bien investis qui travaillent à la mise en place d'un centre culturel. L'une de ces jeunes, Ella, me dit, comme les autres bosniens que nous avons rencontrés, qu'elle veut vivre en Bosnie-Herzégovine. Mais elle veut beaucoup voyager, notamment étudier en Europe de l'ouest pour revenir avec assez de compétences pour aider les habitants de son pays.

 

Voilà, dressé rapidement, en deux volets, nos impressions et notre vécu dans ce pays magnifique, tout entier recouvert de montagnes et dont l'identité est plus que… complexe ! Un laboratoire européen qui donne envie de s'y investir et qui reste notre meilleur souvenir du voyage.

 

Mıchel


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