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05 July 2006

Bonnes vacances

Chers amis,

 

 

Les grandes vacances sont enfin arrivées ! Pour les plus jeunes c’est la fin de l’école, du collège ou du lycée, et pour les étudiants, la fin des partiels… à condition de ne pas devoir aller aux rattrapages de septembre !

 

Pour nous, il faut l’avouer, rien ne change vraiment ! Nous ne sommes jamais vraiment en vacances ni jamais vraiment au travail. C’est une année vraiment très spéciale, qui ne ressemble à aucune autre. Néanmoins, nous avons tout de même déjà eu de réelles vacances. Et oui, nous avons passé deux semaines en Grèce, sur la presqu’île d’Halkidiki et dans les villes de Thessalonique et Florina. Nous avons, pour la première fois, utilisé notre camionnette pour faire du VRAI camping sauvage, au bord de la mer, avec la nature pour seule compagne. Un vrai régal !

 

 

Comme vous l’aurez compris, nous sommes toujours très en retard sur le blog. A vrai dire, depuis la Bosnie-Herzégovine, nous sommes passés par la Serbie, le Kosovo, la Macédoine, la Grèce, la Roumanie, la Bulgarie et nous nous apprêtons à rejoindre la Turquie. Peut-être que ce retard peut paraître difficile à comprendre mais il faut s’imaginer qu’un seul article nécessite plusieurs heures de travail, une connexion Internet, et que tout cela n’est pas si facile à trouver pendant ce voyage très dense où il faut vivre et rendre compte de ce que l’on vit dans le même temps. De même pour les photos. Entre le temps nécessaire à les réaliser, puis les trier (les photos visibles sur le blog ne représentent qu’une petite partie de l’ensemble des clichés déjà en notre possession… plus de 10000 photos), puis les télécharger sur le site et y faire des commentaires, si l’on met toutes ces opérations bout à bout, vous pouvez atteindre aisément deux jours de travail pour une cinquantaine de photos. Si vous vous en souvenez bien, nous avions sacrifié la Slovénie pour passer douze jours à Ljubljana où nous avons seulement travaillé pour rattraper notre retard. Nous aimerions sincèrement être plus régulier sur le blog mais il faut dire la vérité, nous n’y arrivons pas ! Néanmoins une session de rattrapage est prévue dans les mois à venir car nous avons vraiment pris trop de retard. En tout cas les vacances ne signifient rien de plus, pour nous, que la poursuite de notre voyage. Seul différence, après l’épreuve du froid pendant l’hiver, nous avons à lutter aujourd’hui contre la chaleur qui rend nos nuits dans la camionnette bien inconfortables.

 

 

Enfin, nous aimerions vous faire partager quelques conseils de lectures légères et agréables pour ces vacances. Dans les prochains jours, nous allons publier deux ou trois articles sur le sujet. Je vous laisse les découvrir.

 

Mais sans plus tarder, je ne saurais trop vous conseiller la lecture d’un auteur très connu et très abordable, Milan Kundera.

Pour ceux qui ne le connaissent pas, c’est un auteur tchèque qui vit en France depuis 1977. Et ces livres sont vraiment bons ! J’avais lu, avant le voyage, « Le Petit livre du rire et de l’oubli ». Puis, lors de notre périple, le plus célèbre ouvrage de l’auteur « L’Insoutenable légèreté de l’être » et enfin, pendant nos vacances grecques, « La Valse aux adieux ». Le style de l’auteur se retrouve dans tous ses ouvrages, qui, finalement, se ressemblent beaucoup. Cet homme est extrêmement habile et déconcertant lorsqu’il s’agit de fouiller notre intimité. Il s’amuse, avec une légèreté étonnante, à nous montrer combien nous sommes impuissants à nous comprendre nous-même et à comprendre les autres, tout comme nous sommes impuissants, le plus souvent, face aux événements qui nous entourent et nous façonnent. C’est léger et drôle, triste et tragique, mais surtout, c’est neutre, sans aucun parti pris. Voilà pourquoi lire Milan Kundera est à la fois extrêmement agréable mais aussi, souvent, un peu dérangeant. Ce « philosophe de l’intime » est un vrai virtuose et il sait rester simple. C’est l’un de mes auteurs préférés, de loin, et je suis certains qu’il vous fera passer de très bons moments, même si, ne m’en voulez pas trop, on ressort rarement indemne après avoir parcouru l’un de ses livres.

 

 

Si vous me le permettez, j’aurai un dernier conseil pour ces vacances.

 

Pour ceux qui ne peuvent pas partir, regardez mieux autour de chez vous, le voyage est accessible partout. Notre propre ville, notre département ou notre région, recèle de richesse bien souvent méconnues car trop proches pour qu’on s’y intéresse. La France n’est pas la première destination touristique du monde pour rien, c’est un pays magnifique, c’est vrai, et notre voyage continue de le confirmer. Et puis reste la solution d’un bon livre, d’une nouvelle activité, etc, le voyage est à la porté de tous.

 

Mais pour ceux qui ont la chance de partir quelque part à « l’étranger », je les encourage à un peu plus d’audace. Franchement, aujourd’hui c’est facile et il y a de nombreux moyens pour le faire même lorsqu’on a un petit portefeuille. Car, sur notre route, les Français sont rares, même inexistants, sauf, et là ils pullulent, dans les destinations touristiques les plus classiques : Prague, Budapest, Venise et Dubrovnik. Les champions de l’aventure restent les Allemands puis les Anglais, que l’on croise un peu partout et bien souvent dans des endroits inattendus. Nous comprenons toujours un peu plus le stéréotype qu’on nous rabache à longueur de temps sur les Français qui sont « fiers » et « arrogants », « qui ne s’intéressent pas aux autres » et « qui ne parlent pas anglais », pire « qui ne veulent pas parler anglais » nous dit-on. Et leur manque de curiosité à l’égard de l’étranger semble confirmer en partie ces stéréotypes. Pour un pays qui se veut une vocation universaliste, il n’y a pas de pire contresens que de ne pas s’intéresser au monde qui l’entoure. Et surtout en Europe, ou « l’étranger » et un mot qui ne convient pas vraiment à des pays qui nous ressemblent tellement. Partir quelque part en Europe c’est de la « petite aventure sans risques et… sans grande aventure », ce que nous confirme aussi ce voyage. Et s’il vous fallait un dernier exemple pour vous assurer de mes dires, allez donc passer une semaine de vacance au Kosovo. Endroit tout à fait sûr, où nous avons passé deux semaines excellentes, avec des gens très accueillants, à majorité musulmane et qui pourtant vous ressemblent en tout point, boivent du vin, ne portent pas de foulard, etc. Et la présence des « internationaux », tout comme en Bosnie-Herzégovine vous apportera une véritable touche d’exotisme, de différence.

 

 

Alors à chacun son voyage, les possibilités sont infinies, et, si on sait y mettre un brin d’audace, elles sont aussi pleines de surprises.

 

Bon vent,

 

Michel

29 June 2006

Banja Luka, Tuzla.

Nous voici donc en Republika Srpska à Banja Luka. L’accueil que nous réserve Bérengère, (la directrice du centre culturel français) est très enjoué. Suite à notre première intervention, deux anciens militaires nous invitent  à poursuivre le débat autour d’un verre. Voici quelques unes de leurs analyses:
"La religion dans ce conflit n’est qu’un prétexte, celui-ci permet aux politiciens de s’enrichir davantage... Il s’agit également de répondre à l’intérêt des grands pays, l’influence que ceux-ci exercent étant considérable. La Bosnie nous plaît bien sûr , nous n’avons d'ailleurs pas de réels problèmes en ce qui concerne la cohabitation dans notre vie quotidienne, la guerre a simplement amplifié les différences. Les raisons du conflit: le morcellement bien sûr, à cause des minorités, avec leurs vélléités d’indépendance, mais bon il faut reconnaitre malgré tout que les trois armées ont leur part de responsabilité dans ce conflit."

medium_P1030108.JPGLe lendemain, nous réalisons une intervention auprès de la branche jeune du parti social-démocrate. Notre intervention s'avère difficile à mettre en place, le public ne maïtrisant pas l'anglais, une interprète s'efforce de traduire nos propos. Nous ne parvenons malheureusement pas à installer un réel débat, je retiendrai la remarque de l’une des jeunes militantes. Celle-ci clame ouvertement sa préférence pour la monarchie: "une personne détenant un pouvoir de droit divin, concentrant l'ensemble des pouvoirs, peut être réellement efficace pour le pays. Dans une démocratie deux personnes travaillent pour cinq, je préfère dans un sens la dictature". Cette adolescente bien que militante dans un parti faisant la promotion de la démocratie la rejette en bloc: cherchez l'erreur? Une analyse succinte permet de mieux comprendre ce raisonnement: cette jeune fille se focalise sur le court terme, elle souhaite indubitablement améliorer la situation chaotique du pays, et ce par l'intermédiaire d'un pouvoir fort apparemment à même de rétablir l'ordre dans les plus brefs délais...

Le but de la démocratie n'est-il pas le vivre ensemble, trouver une solution en faveur du bien commun? La plupart de ces jeunes ne croient pas vraiment en la démocratie,  pour eux il ne s’agit que d’une idée, un concept. Le problème que connaît ce pays est davantage le chomâge, près de 40%. "Notre quotidien c'est la survie!" Ils pensent, et c’est bien compréhensible, dans un premier temps à résoudre leurs propres problèmes.  Ils espèrent être reconnus en tant que Bosno-Serbe, aspirent à améliorer leur quotidien, à disposer de la liberté d’entreprendre, de tenter leur chance, de disposer de la possibilité d'améliorer leur sort... A la question : "Comment devrait-être choisi le représentant du peuple?" ils répondent: " par un choix qui respecte des principes démocratiques mais aboutir à cela tient déjà de la gageure!!! ".

Bérangère organise pour nous de nombreuses interventions auprès d'un public on ne peut plus varié, ce qui nousmedium_P1030168.JPG permet d'effectuer nombres analyses comparatives. Lors d'une soirée, l'occasion nous est donnée de converser avec un institutionnel travaillant pour l'OSCE, il nous livre son analyse: "certaine organisation impose la démocratie, usant d'une certaine violence, ou à défaut intimidant leur interlocuteur afin d'obtenir sa coopération!!!". "Il y a toute une constellation d’institutions internationales dans le pays ce qui dans un certain sens ne facilite pas la situation" ajoute-t-il. Nous abordons également les nombreuses difficultés que comportent la gestion de la Bosnie-Herzégovine.

Une deuxième intervention auprès d'autres militants du parti social démocrate se révèle beaucoup plus concluante. Les jeunes membres avouent pour la plupart se sentir plus serbes que bosniens. Un lourd poids pèse sur ceux-ci, qui n'est autre que celui de l'opinion internationale. Ils aimeraient tourner la page, que l'on cesse de considérer l'ensemble des Bosno-Serbes comme des criminels de guerre. L'un d'entre eux ne pourra s'empêcher de clamer avec fierté son amour pour sa patrie, il se sent serbe de Bosnie-Herzégovine et ne souhaite en aucun cas être assimiler à Belgrade. "Je respecte profondément les autres nations quelles qu'elles soient, la moindre des choses c'est que l'on me rende la pareille". Gracieusement invité au restaurant, nous interrogeons nos hôtes, la conversation va bon train, l'une des militantes nous confie qu'elle aspire à voyager mais en aucun cas changer de pays, le statut qu'elle a acquis ici elle ne souhaite certainement pas le perdre.

medium_P1030217.JPGLa veille de notre départ nous assistons à une série de matchs de kick-boxing, il faut avouer que les nombreux panneaux publicitaires sont assez convaincants. Nous retenons le fairplay des participants, l'incontournable musique de Rocky lors de la finale, répétée à trois reprises, la bimbo chargée d'annoncer le début de chaque round, les acclamations de la foule... Une ambiance à laquelle, il faut l'avouer, nous ne sommes pas habitués. Le lendemain nous saluons nos amis Bérengère et Guillaume et nous dirigeons vers Tuzla où Pascal se charge de notre accueil. Au cours de la soirée nous goûtons divers mets très appétissants dont une boisson très rafraichissante: la Boza, une boisson jaûnatre à base de fleur. Nos interlocuteurs, des jeunes souhaitant aménager un centre culturel, nous confient leurs difficultés. Tuzla nous est présentée comme un havre de paix où la tension entre communauté est quasi inexistante...
Nous dormons dans le centre culturel français et passons la journée du dimanche à travailler, avant de pousuivre notre route le lundi direction la Serbie et sa capitale Belgrade.
 
Yves Mouillet.

yvouche@yahoo.fr

13 June 2006

Rencontre avec de jeunes Bosniens.


Lundi 03 avril au mardi 04 avril.

Nous voici donc à Sarajevo, sur place il nous faut trouver le sempiternel établissement scolaire. Lorsque nous demandons quelques indications, nous constatons avec amusement à quel point la prononciation d'un mot est importante, la moindre différence et la communication s'avère impossible: prenez l'exemple du mot (centre), centar, nous avons beau essayer toutes les façons, aucun Bosnien ne semble comprendre ce que nous signifions... Nous ne tardons pas cependant à trouver le Druga Gimnazija. Notre publique est cette fois composé d'élèves bosniaques, (que l'on assimile à des Musulmans). Un petit rappel: la république de Bosnie-Herzégovine, (BiH), comprend deux entités autonomes, la fédérarion croato-musulmane de BiH ainsi que la Republika Srpska, (République serbe de Bosnie). medium_P1020857.JPGPourtant, ces élèves aspirent à la réconciliation, ils affirment considérer la Bosnie-Herzégovine comme un seul et même pays. Nermin laisse éclater sa colère: "de nombreux préjugés perdurent: si un Bosnien (habitant de la Bosnie toute identité confondue) affirme son appartenance à tel ou tel groupe, l'interlocuteur assimilera sa revendication à une religion ainsi qu'à une ethnie. Ce qui est bien entendu réducteur au possible!!! Je suis de confession musulmane; c'est une partie de mon identité, mais je me sens bosnien de nationalité, non pas bosniaque." Ces élèves nous rappellent qu'ils sont avant tout bosniens et ont pour religion l’Islam ce qui ne signifie pas que celle-ci se confonde avec leur nationalité. La situation est extrémement complexe: prenons l’exemple de Senka qui possède un nom à la consonnance chrétienne voire orthodoxe. Quand elle se présente, les gens pensent qu’elle est croate ou serbe, certainement pas bosniaque (bosno-musulmane), ce qui, bien entendu, occasionne nombres confusions et autres situations embarassantes.
La prise en main internationale est considérée par ces élèves avec circonspection : "c’est mieux pour notre sécurité, faire partie de l’Europe, cela signifie voyager sans visas..." La présence de l’Eufor, (la Force de l'Union européenne), qui a succédé en Bosnie-Herzégovine à la Force de stabilisation (Sfor) de l'OTAN semble appréciée: « C’est vrai qu’il y a beaucoup d’étrangers, et que dans un sens c’est une autre forme d’occupation, mais objectivement nous sommes encore très dépendants, nous avons besoin de la présence d’une armée à caractère internationale » nous affirme Nermin. Les panneaux publicitaires pour l’Eufor fleurissent d’ailleurs ici et là, avec pour slogan: "une équipe là pour vous aider…"

Ces jeunes élèves déplorent l'apathie générale des Bosniens: « on parle beaucoup, sans pour toutefois agir, peu de gens vont voter, ce n’est pas ainsi que la situation va changer... » Ces personnes sont évidemment trop jeunes, (18 ans), pour se souvenir de la guerre. Ils se rappellent vaguement des moments difficiles que leurs parents ont connus. En 1995 lors du traité de Dayton, (fin de la guerre), ils sont contents, mais ne parviennent pas à justifier la joie ressentie lors de ces accords. Certains d'entre eux, alors enfants, entonnaient des chants louant la paix sans vraiment connaître la signification de ce mot. L'environnement dans lequel ils sont nés, (faut-il le rappeler ?), est considéré comme intolérable d'un point de vue extérieur, cependant, celui-ci bien qu’inhospitalier correspondaient alors à ce à quoi ils étaient habitués, leur normalité. C'est peu à peu, dôtés du recul nécessaire à toutes introspections, qu'ils prennent conscience des conditions désastreuses dans lesquelles ils vivaient alors.

Nos amis expriment leur profonde rancoeur face aux prejugés de toutes sortes, notamment la déconsidérationmedium_PICT0006.JPG immédiate lorsque l'on est musulman. « Nous ne sommes pas tous des Ben Laden » clament-ils avec vigueur. Il faut admettre que ces jeunes ne correspondent en rien à l'image caricaturale de l'Islamiste véhiculée par les médias. Vous en jugerez vous-meme via la galerie-photo...

Leur peur quant à une éventuelle entrée au sein de l’UE est bien réelle, ils veulent conserver leur racine, pas de vie rapide, ces jeunes, très attachés à leur pays, veulent voyager intensément mais toujours revenir. Amra nous parle du mode de vie bosniaque: meraklija, (il s'agit de prendre le temps de vivre, faire chaque chose à son rythme, sans se presser). Chacun de leur prénom a une signification particulière : Senka veut dire ombre , Nermin, signifie héros, Amra: princesse… Ils évoquent avec dérision les nombreux problèmes qui affectent leur pays, nous parlant entre autre de la Stela, le piston, les contacts permettant d’obtenir les choses d’une manière insidieuse: postes, concours, examens...

Cette rencontre nous laisse un excellent souvenir, la Bosnie-Herzégovine si durement touchée par la guerre a sans nul doute besoin de cette génération au sang neuf. L’enthousiasme de ces jeunes laisse présager le meilleur pour ce pays plus que jamais à la recherche de ses marques.

Yves Mouillet

yvouche@yahoo.fr  

02 June 2006

Mostar, Bosnie-Herzegovine

 

Ce matin nous passerons enfin la frontière après avoir acheté la fameuse « Green card » qui coûte 36 euros (72 marks convertibles, la monnaie en cours en Bosnie-Herzégovine). Nous ne tarderons pas à rencontrer la medium_P1020413.JPGdifférence sur notre route : une mosquée ! En voir une en "vraie", c'est la premiere fois! De construction très simple : un petit bâtiment de forme carré avec une coupole au dessus et, sur le côté, un minaret. Le tout de couleur blanche, sauf la pointe du minaret en métal noir ou vert. Ce qui est assez déroutant, c’est que celle-ci, et toutes celles que nous allons rencontrer sur notre route, sont situées au milieux de villages qui ressemblent à des villages français, allemands, polonais ou slovène. Mais dans ces villages, pas d’église, une mosquée ! Neanmoins attention, nous sommes dans la Fédération bosno-croate et cela veut dire qu’il y a aussi des villages croates. On ne peut pas se tromper lorsque nous en traversons un. Le drapeau croate est accroché aux poteaux électriques et on ne trouve pas de mosquée mais une église puisque, le plus souvent, les Croates sont catholiques. Voilà le premier aperçu d’un pays où la situation est extrêmement compliquée.

 

 

En effet, la Bosnie-Herzégovine est divisée en deux parties : la Fédération bosno-croate (majoritairement composée de bosniaques le plus souvent de confession musulmane et de Croates le plus souvent de confession catholique) et la Républiqua Srebska (majoritairement composée de Serbes le plus souvent de confession orthodoxe). Le pays fût le plus durement touché par les guerres balkaniques (plus de 220000 morts, massacre de Sebrenica, etc) et la paix règne enfin depuis les accords de Dayton en 1995. Mais ces accords ont entériné la division ethnique du pays et ce dernier est toujours une sorte de "colonie", de "protectorat européen" où le représentant de l’ONU qui « dirige » le pays détient un pouvoir quasi absolu. Enfin, la force militaire de 6000 hommes qui se trouve sur place, dirigée par l’Union européenne, l’EUFOR, a pour mission de maintenir l’ordre.

 

 

Après ce bref aperçu de la situation, nous arrivons donc à Mostar, ville symbolique de part sa division entre Croates catholiques et Bosniaques musulmans. La guerre y fût  particulièrement rude et les destructions immenses. Le symbole de la ville, le « Vieux pont » qui reliait les parties croates et bosniaques de la ville, fût reconstruit et a été inauguré en 2004. Depuis, cette ville magnifique est devenue très touristique. Et c’est vrai qu’elle est belle, Mostar, magnifique même ! Un paysage de petites montagnes, une ville traversée par une rivière à la couleur bleue-verte, des mosquées flambant neuves, toutes en pierre, vraiment magnifiques (financées par de nombreux pays musulmans), une atmosphère orientale agréable, un vieux quartier riche de magasins à souvenirs vraiment originaux, et le Vieux pont, avec sa voûte brisée, tout simplement superbe… le tout sous un soleil radieux ! Pour nous le voyage commence enfin, ici, en Bosnie-Herzégovine, car nous sommes, pour la première fois, confronté à de la vraie différence.

 

 

Dès notre arrivée nous sommes abordés, aux abords d’une agence de tourisme, par la propriétaire qui parle français et semble en être très fière. Elle nous propose la visite d’une mosquée, la plus grande de la ville, le tout gratuitement. L’intérieur est vraiment beau, l’art oriental nous comble par ses couleurs et sa différence. Nous montons dans le minaret et contemplons le panorama de la ville, notamment le « Vieux pont » que nous voyons pour la première fois. Nous dînerons ensuite dans un restaurant, les fameux Pita burek avec leur pain spécial et la bière locale, la « sarajevsko pivo » (pivo veut dire bière, comme dans tous les pays de langue slave). Nous retrouvons des prix attractifs, après la Slovénie et la Croatie qui étaient beaucoup plus chers que les autres pays d’Europe centrale que nous avons traversés jusqu’à présent. Nous payerons avec les Kunas croates qui nous restaient et on nous rendra la monnaie en Mark convertibles et en euro… c’est l’Europe avant l’Europe ici ! medium_P1020408.JPGPassent devant le restaurant des militaires avec un ecusson européen et français. Je vais les aborder et leur demander la permission de les prendre en photo. Ils seront très aimables et après plusieurs questions prendront même l’adresse de notre blog. Dix minutes après, d’autres militaires passent, cette fois ecusson européen et allemand. Je les prendrais aussi en photo. C’est notre première confrontation avec l’EUFOR et nous tombons sur le « couple franco-allemand ».  

 

 

Nous passons du côté ouest de la ville avec pour objectif le Centre culturel français où Céline, la directrice, nous attend. De ce côté, comme de l’autre, beaucoup de ruines, des bâtiments éventrés recouverts d’impacts de balles. Depuis Vukovar, nous y sommes maintenant habitués. C’est la partie croate de la ville et comme pour défier les nombreuses mosquées qui se trouvent de l’autre côté, une église en béton, toute neuve elle aussi (c’est d’ailleurs l’une des seules églises), élance son clocher à une hauteur impressionnante. Et, peut-être pour combler le manque d’église, une immense croix se dresse sur la montagne en arrière fond, à une hauteur visible de très loin.

Nous trouvons le Centre et sommes bien accueillis par Céline. Elle a organisé pour nous une intervention dans une école. Le soir, elle nous emmène à Abrasevic, un centre culturel où se trouve le seul cinéma de la ville. Nous y regarderons un film en espagnol, sous-titré en serbo-croate, une comédie tragique sur la seconde guerre mondiale. Un excellent film, projeté dans une salle rudimentaire à l’aide d’un projecteur d’époque. Le dépaysement est complet ! A la sortie, nous croisons d’autres militaires, cette fois ecusson européen et espagnol. Yves discute quelques minutes avec eux et, comme de bien entendu, je prends la désormais traditionnelle photo. On nous propose de garer notre camionnette dans l’enceinte de cet endroit entièrement géré par des jeunes, ce que nous acceptons avec joie. Nous y resterons une bonne semaine, avec douche, sanitaire et Internet à disposition. Royal !

 

 

Nous réalisons notre intervention le lendemain dans une école primaire avec des élèves de 10 à 14 ans. Incroyablement réceptifs, ils parlent tous un très bon anglais, ce qui nous dispensera d’avoir recours à notre interprète. Ces jeunes sont ouverts et curieux et nous donnent beaucoup de satisfaction. De plus, comme d’habitude lorsque nous sommes confrontés à des jeunes durant nos interventions, je suis toujours frappé par l’impossibilité totale de deviner leur nationalité d’origine. Ils pourraient très bien être français ou hongrois, il faut les entendre parler pour savoir qu’ils sont… encore faut-il reconnaître la langue ! Ici on parle une langue slave qui ressemble comme deux gouttes d’eau au slovène, au croate, au serbe, au macédonien, au bulgare, mais aussi au polonais, au tchèque, au slovaque et au russe, même si la différence est plus marquée avec ces quatre dernières langues. Alors, en plus, lorsqu’on vous dit que les jeunes qui sont devant vous sont musulmans !!! Je fais le pari que plus d’un français aurait du mal à croire qu’ils le sont vraiment, ses clichés en étant totalement bouleversés en voyant ces enfants tout à fait semblables aux siens. Décidément les Européens me font doucement rigoler! Ils s’attachent  à des différences qu’ils imaginent immenses alors qu’ils se ressemblent tellement! Je leur conseille vivement d’aller faire un tour dans un village animiste africain, en Chine, au Groenland ou en Inde et ils comprendront ce que c’est que la vraie différence… et encore ! Si vous allez à Shangaï ou à New Delhi, la différence commence à s’estomper rapidement. Quoi qu’il en soit, ce fût l’une de nos meilleures interventions et ces jeunes nous laissent plein d’espoir à notre départ.

 

 

Nous restons à Mostar jusqu’au vendredi, jour de notre départ pour Sarajevo. Nous passerons nos journées à visiter la ville, travailler et discuter avec les jeunes d’Abrasevic. Nous croiserons encore des militaires belges, et medium_P1020397.2.JPGmême un marocain ! Au début je ne réussi pas à deviner l'ecusson au dessus du drapeau européen sur son épaule. Je m’approche et je constate, à ma grande surprise, que c’est le drapeau marocain. Je discuterais avec lui quelques instants. J’en déduis logiquement que même si l’EUFOR est à majorité composée de soldats européens, elle est, en fait, une sorte de force des Nations unies sous commandement européen avec un recrutement de militaires plus international.

Nous constatons aussi que beaucoup de pays ont apporté leur soutien à la reconstruction de la ville. Les mosquées financées par l’Arabie saoudite ou la Turquie, les bains publics par l’Italie, un pont de pierre par le Duché du Luxembourg, un centre de jeune par l’Espagne, etc.

Enfin, comme nous sommes dans un endroit « protégé » et que le soleil est radieux, nous en profiterons pour faire le premier "grand ménage" de notre camionnette. On peut le dire, c’était vraiment le bordel! Une bonne après-midi consacrée à cette tache ne sera pas de trop pour venir à bout de notre opération rangement et nettoyage !

 

 

Le départ est difficile car nous avions des conditions de séjour vraiment optimales dans cette ville magnifique. Mostar nous laisse un excellent souvenir de beauté et de différence. Il est temps de partir pour Sarajevo, la célèbre capitale de la Bosnie-Herzégovine.

 

 

Michel

19 May 2006

Zadar, Split, Dubrovnik.

Lundi 20 mars au Dimanche 26 mars.
Après de nombreux préparatifs, nous finissons par partir, direction Zadar. Tout semble nous sourire: la température avoisine les 20 degrés, la radio, contre toute attente, diffuse une musique délicieuse, un nouveau voyage commence ??? Je prends le volant et conduis près de 400 kilomètres. Enfin, nous faisons une halte,  Il reste encore 189 km à parcourir. Nous faisons une pause dans un bar à proximité de Zadar, apprécions le paysage montagneux et nous accordons un expresso. Un soap-opera (série télévisée) espagnol fait office d'animation, en version originale sous-titrée croate, quel entremêlement culturel! Nous arrivons à destination vers 19h30, un constat affligeant s'impose: nous avons payé plus de 40 euros de péage. Nous trouvons une place non loin du centre-ville, puis en profitons pour nous balader... Les ruines de Vukovar sont bien loin, le contraste est saisissant. La côte croate, (la Dalmatie) nous fait beaucoup penser à l'Italie. La température est douce, l’air marin, les palmiers jonchent les trottoirs, le centre-ville s'annonce prometteur...
Zadar compte environ 85000 habitants. C’est le premier jour du printemps aujourd’hui, mais le temps n’est malheureusement pas aussi clément que la veille, il pleut !!! Notre intervention se  déroule paisiblement, quand soudain à notre grande surprise, des journalistes débarquent une caméra à la main. Une équipe d'une chaîne nationale de Croatie est chargée de pousuivre le reportage effectué à Zagreb. Cependant celle-ci, au grand damne de notre interviewer, est rapidement sollicitée pour un autre shooting sans avoir terminé le nôtre. Les voies du quatrième pouvoir, (la presse), sont décidément impénétrables... Un groupe de professeurs, ainsi que le directeur nous attendent déjà dans un restaurant. Nous nous éclipsons peu après le repas, nous devons déjà partir direction Split, qui se situe à environ 170 km de Zadar. Les paysages de la Dalmatie sont sublimes, la mer, la montagne, les îles alentours, tout est féerique! Split compte environ 300 mille habitants, quel plaisir de s'aventurer dans un tel centre-ville: la mer, le marché, les édifices, l’influence romaine, l’opéra, la plage… Nous ne pouvons que nous extasier face à un tel spectacle!
Le réveil sonne vers 07h30, notre intervention est prévue au sein du Gymnasia 2 Split, vers 10 heures. Malgré notre avance, nous pressons le pas et nous dirigeons vers l’office de tourisme, on nous indique l’école sur le plan, on nous rassure nous disant que celle-ci se situe à environ 5 minutes de marche. Disposant d’environ 45 minutes, nous n’hésitons pas à prendre clichés et autres films souvenirs, enfin nous nous dirigeons vers la rue indiquée. La moue dubitative des passants que nous interrogeons nous fait rapidement comprendre que l'on nous a fort mal renseigné! C'est donc au pas de course que nous arrivons au sein de l'établissement, un professeur et... un journaliste se chargent de notre accueil. Nous convenons rapidement d’un rendez-vous avec celui-ci et commençons sans plus tarder notre intervention. Les jeunes gens présents, (une quarantaine de personnes), ont été dûment sélectionnés: deux étudiants par classe, un délégué accompagné d'un élève ayant manifesté un vif intérêt pour notre présentation, sont chargés de réaliser un compte-rendu à leurs camarades, (soit un impact sur plus de 20 classes). L'un des élèves va même jusqu'à rédiger un petit poème en anglais dans lequel il nous décrit sa vision d'un avenir harmonieux. Enfin, nous rejoignons les journalistes. Ceux-ci, à la manière de metteurs en scène, élaborent un reportage relatant notre expédition rêve d'Europe. Nous sommes interviewés face à la mer, faisons mine de dialoguer, effectuons de multiples manoeuvres avec notre véhicule... Le jeu d’acteur n’est pas de tout repos!
Nous partons le lendemain vers 16 heures. Dubrovnik est situé à environ 200 kilomètres. La nuit tombante nous empêche d’apprécier notre itinéraire à sa juste valeur. Arrivés à proximité du centre-ville, une voiture nous fait des appels de phare, il s’agit de notre contact qui a reconnu notre immanquable camionnette bleue, heureux hasard! Celui-ci nous aidera à trouver un parking sûr à proximité du centre-ville.
Le jour suivant, nous constatons lors de notre présentation une nette différence avec le public. Les jeunes gens de cette classe sont beaucoup plus expansifs. Ils nous posent des questions sur la façon dont nous considérons le conflit dans les Balkans, nous interpellent… Notre point de vue les intéresse. Ils récusent le jugement du TPI, (tribunal pénal international), qui ne ménage pas la Croatie, dénonçant les exactions, ici et là. Nous nous démenons pour leur démontrer qu’il n’y a pas de guerre propre, effectivement la Serbie a été le premier aggresseur, cependant certains Croates ont eux-mêmes commis nombres d'exactions… Peu après l’intervention, nous faisons un tour dans une voiture très prisée ici: la 4L, direction un studio radiophonique où nous nous faisons interroger. Nous profitons de l'après-midi pour visiter la ville, cependant après quelques heures l’ennui nous gagne, que faire ? La mine renfrognée nous nous dirigeons vers un pub afin de poursuivre notre labeur...
Le soleil est éclatant aujourd'hui, sans l'ombre d'une hésitation nous enfourchons nos vélos et tâchons de gravir quelques côtes, non des moindres! Nos efforts sont cependant récompensés: la vue est tout simplement splendide. Attention tout de même, au sommet de la montagne qui surplombe Dubrovnik, certains terrains sont encore minés, il s’agit d’être prudent. A nouveau nous changeons de cap, direction Mostar. A proximité de la côte, Michel fait brusquement demi-tour!!! Il veut prendre son premier bain de mer, nous nous jetons à l’eau non sans difficultés… Revigorés nous repartons direction la Bosnie-Herzégovine, une mauvaise surprise nous attend cependant. Sans carte verte, nous ne sommes pas autorisés à traverser la frontière et un dimanche il est impossible de se procurer le précieux document !!! La mort dans l’âme nous rebroussons chemin et passons la nuit dans une petite ville croate à proximité de la frontière…

Yves Mouillet
yvouche@yahoo.fr